Cette année là, les Jeux Olympiques de Los Angeles consacraient le plus grand athlète de tous les temps, Frederik Carlton Lewis dit Carl Lewis, quadruple médaillé d’or, Michel Platini donnait l’occasion au portier ibère, Luis Arconada, de rentrer dans le glossaire des cagades footballistiques et à la France du Football de remporter son premier titre majeur dans une compétition internationale. En 1984, les magnétoscopes américains déroulaient fébrilement leurs bandes et offraient à l’Amérique pudibonde la plus grande star porno de tous les temps, Traci Lords.
Au beau milieu d’une industrie à peine sortie de l’artisanat laborieux du sexe, une véritable bombe sexuelle explosait. La croupe callipyge, des seins en forme de poire, des yeux maquillés comme une voiture volée, une crinière de lionne et une moue hargneuse, cette fille ressemblait à une voisine un peu vulgaire et très bandante que vous matiait en douce, vous, l’adolescent biactolisé, quéquete à l’équerre et sève prête à jaillir.
Traci Lords avait une bouille de salope, des yeux qui criaient braguette et un passé peu ordinaire qui, plus tard, ferait office de légende. Dans ses films, elle irradiait de plaisir, elle gémissait comme une possédée, petite sœur coquine du personnage interprété par Linda Blair dans l’Exorciste, éructant et vociférant, l’écume verdâtre aux lèvres remplacée ici par les giclées séminales de ses mâles partenaires.
Miss Lords chevauchait les étalons du X américain à la manière des solides cow-boys de rodéo. A de maintes reprises elle épuisait le frêle Tom Byron, éphèbe défolié au corps d’adolescent pré pubère mais au sexe de centaure .Ils formaient le couple hot du X business, avec pour eux l’atout de la jeunesse, le diable chevillé à leurs corps brûlants d’étreintes VHSiées par des producteurs douteux qui alignaient les lignes de coke pour garder sous pression leurs vaches à lait. Ainsi naquit au vu au su de l’Amérique reaganienne celle qui allait transformer à jamais le statut des actrices pornographiques.
Nora Louise Kuzma voit le jour dans l’Ohio en 1968, née d’un père immigré ukrainien, ouvrier alcoolique et violent, et d’une institutrice dénommée Patricia. Brutalisée par son époux, la mère de famille prend ses 4 filles sous le bras pour déménager direction Californie, à l’aube des années 80.Nora ne trouve pas la stabilité familiale dans cette migration puisque qu’elle est victime des assauts de son beau père, le dénommé Roger, revendeur de drogue de son état. Malgré ces mauvais traitements, elle reste sous la coupe de ce mec peu recommandable qui ne trouve rien de mieux que de profiter des atouts physiques de sa belle fille pour gagner un peu de maille en lui faisant faire des photos érotiques . Avec la complicité de son beau père, Nora s’invente une nouvelle identité qui la voit passer de 13 ans à 18 ans, âge légal pour disposer de son corps. Nora devient Kristie Nussmann. L' illusion ne fait que commencer.
Elle fait la rencontre de James M.Souter Jr alias Jim South, propriétaire d’une agence de mannequin un peu louche sur Van Nuys Boulevard dans la San Fernando Valley (temple californien du porno des années 80). Des photos de charme aux tournages porno, il n’y a qu’un pas que le peu scrupuleux Jim South se fait un plaisir de faire franchir à la jeune femme.
Nora/Kristie doit changer une fois de plus de patronyme et se trouver un nom d’artiste pour pénétrer derrière la porte X. Empruntant à la fois le nom de l’héroïne incarnée par Katharine Hepburn dans «The Philadelphia Story» de George Cukor et le nom de l’acteur vedette de sa série préférée «Hawaii, police d’état» , Nora Louise Kuzma devient Traci Lords.
Après avoir posée nue pour la page centrale du magazine pour hommes, Penthouse, en septembre 1984, Traci Lords tourne son premier film X intitulé « What Gets Me Hot ». Les films s’enchaînent alors, torrides témoignages de l’ardente flamme qui brûle entre les cuisses de la jeune femme.
En deux ans de 1985 à 1986, Traci Lords tourne des dizaines de films et gagne plusieurs oscars du porno. Elle se fait vite haïr de ses concurrentes du moment et trouble ses partenaires masculins au point que certains doutent de l’âge de la hardeuse, etonnés par la maturité sexuelle de cette jeune femme au corps d’adolescente mais au caractère de chienne du pieu. Jamie Gillis, un vieux de la vieille du porno témoigne encore aujourd’hui «elle avait l’expérience sexuelle d’une femme de 40 ans». L’acteur réalisateur Paul Thomas confirmera quelques années plus tard «Traci Lords était une des rares actrices qui ne s’arrêtait pas baiser une fois la caméra éteinte, elle voulait continuer, pour prouver qu’elle baisait mieux que n’importe qui».
Les films s’enchaînent et les dollars pleuvent, en 1986, avec un budget colossal pour le genre – 50 000 dollars – Traci part tourner à Paris ce qui devait être son chef d’œuvre "Traci I Love You". Le film est mauvais, mal réalisé, Traci semble absente comme dans cette scène improbable où elle se fait pilonner énergiquement par Alban Ceray (voir Né sous X (volume II)) à même le sol, dans un bureau improbable, avec comme seul décor au mur l’affiche du film Le Professionnel avec l’ami Bébel. Peroxydée, l’œil vitreux, Traci Lords n’est plus la sulfurante salope de ses débuts. Quelques jours après son retour de France, Traci Lords est arrêtée par le F.B.I pour avoir tournée 70 films avant sa majorité.
La belle était une usurpatrice de première, une maîtresse de l’illusion qui ferait passer David Copperfield pour José Garcimore. Nora Louise Kuzma alias Kristie Nussmann aka Traci Lords a tout juste 18 ans, elle vient de tourner en France son seul film à l’âge majeur et pendant prés de 3 ans l’Amérique chaste et conservatrice s’est gentiment polie le chibre sur les exploits sexuels d’une mineure élevée au rang de reine du X.
La carrière X de Traci Lords s’arrête d’un coup, elle échappe aux poursuites judiciaires et coopère avec les fédéraux, fait tomber les pervers producteurs qui ont fait fortune sur le cul d’une mineure. Les cassettes de ses films sont détruites pour cause de violation des lois sur la pornographie enfantine coûtant des millions de dollars à l’industrie du porno. La presse va étaler plusieurs versions de ce non-conte de fée, Traci Lords y est dépeinte en ado manipulatrice, en droguée incapable de se rendre compte de ses actes , baisant le X business pour devenir riche et célèbre.
Après une thérapie, une cure de désintoxication et quelques années de repos, Traci Lords engage un agent pour la représenter, prend des cours de comédie au Lee Strasberg Institute et débute une carrière de comédienne «classique » en tournant un nanar de science fiction intitulé « Not of This Earth » sous la houlette de Roger Corman, un rôle dans Cry Baby de John Waters et enchaîne les apparitions dans les séries Mac Gyver, Mariés, deux enfants, Melrose Place et Profiler.
Elle capitalise sur son nom en produisant des cassettes de remise en forme «Warm Up With Traci Lords », elle participe à une chanson que les Manic Street Preachers lui ont dédiée, "Sweet Baby Nothing" et enregistre les choeurs de "Somebody To Love" des Ramones.Elle enregistre un album techno pop intitulé « 1.000 Fires ». Elle écrit une autobiographie . Elle navigue aujourd’hui dans le show biz hollywoodien.
J’étais à peine au lycée que mes premiers émois sexuels se portaient sur quelques photos de Traci Lords, découpées à la va vite dans le magazine qui a constitué le saint fondement de ma modeste érudition pornographique, j’ai nommé Vidéo 7. Ce magazine avait la particularité de causer des dernières sorties ciné et vidéo, grand public j’entends par là, mais aussi d’avoir un encart consacré aux films de boules. Quelques chroniques bien senties sur les derniers films X à la mode, parsemées de quelques jaquettes coquines qui entraînaient l’œil à des nudités interdites, l’acquisition mensuelle de ce magazine constituait une quête du graal à peine troublé par le regard un peu soutenue de la dame du marchand de journaux, une quarantenaire un peu blondasse qui éveillait en moi certaines pensées érotiques.
Mon premier découpage de filles dénudées provient de ce magazine et d’une photo de Traci Lords, provocante et sensuelle. Elle est restée collé un bon bout de temps dans mon cahier rouge, cahier que je faisais reluquer à mes comparses adolescents dans la salle de bibliothèque du lycée Léon Blum de Créteil, lycée réputée pour ses sections voile et cinéma, mêlant amoureux de Godard et fan de Robbie Naish (j’avais choisi le côté cinéma, ayant peu de prédisposition pour tenir debout sur un bout de planche en fibre de verre).
Les photos de cette fille étaient de véritables viatiques pour le plaisir, elles étourdissaient la zone limbique de mon cerveau pendant que je rêvais de voir Traci en chair et en os sur bande (!) vidéo.
Jamais au grand jamais je ne pus à l’époque louer quelques vidéos coquines de la reine du X .Tous les vidéos club avaient retiré les cassettes de Traci suite aux épisodes narrés plus haut. Un premier samedi du mois renseigné par mon programme TV mentionnant la programmation d’un film avec Traci Lords sur Canal Plus., j’attendais patiemment l’heure à laquelle Cendrillon perd ses groles et voit sa caisse remplacée par un cucurbitacée pour mater Traci,. Excité comme une puce, fébrile comme il se doit, j’étais posté devant Canal Plus en crypté (mon daron n’avait pas encore le plaisir d’être un abonné à la chaîne cryptée!). Minuit résonna et là stupeur et tremblement, le film annoncé fut remplacé au dernier moment par un film danois à la con ou d’augustes scandinaves s’envoyaient en l’air dans une campagne improbable au nord de Copenhague . Après l’épisode des vidéos club, j’étais victime de l’interdiction faite à la chaîne de télévision de diffuser des films mettant en scène l’adolescente non majeure.
Bien des années plus tard j’accédais au visionnage de quelques scènes tournées par la Scandaleuse, la légende n’était pas usurpée, Traci Lords avalait les sabres jusqu’à la garde, elle gémissait comme personne, hantées par les démons qui l’habitaient, elle était unique.
L’émoi sexuel que j’éprouvais pour cette enragée du cul venait sans doute de ce que cette fille avait bon an mal an le même age que moi. Elle se démarquait irrémédiablement de mes collègues de collèges et lycées improbables Isabelle Lambert ou Sandrine Girard dont les passions conjuguées pour Morten Harket, (leader des A-Ha) et les bracelets brésiliens n’attisaient pas les feux qui brûlaient en moi ...
Traci Lords restera à jamais dans mon souvenir d’adolescent niaiseux comme elle restera encore longtemps dans les annales du porno ou les Savannah et les Jenna Jameson ne l’ont jamais remplacé. Malgré tout, je n’oublie pas que cette jeune femme, violée par son père à l’âge de 10 ans, aillant avortée à l’âge de 15 ans et droguée tôt dans son adolescence, n’est pas une icône adulte à sanctifier mais un ange déchu qui fort heureusement à retrouver l’équilibre à l’âge adulte.
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